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Pierre Volpatti

MF - La lèchefrite

 


Article type des règlements de piste :
« Pour les 4 temps un sabot récupérateur d’huile sous le moteur est obligatoire.
Il devra être d’une capacité de la moitié du carter moteur plus éventuellement de la boîte de vitesses si celle-ci est séparée.
Il doit comporter deux trous de 25 mm ouverts en cas de pluie. »

 


Pour un four de cuisine, la lèchefrite, c'est le récipient qui recueille le jus gras qui tombe.
Pour nos pistardes (et pas seulement pour les « Four »), c'est pareil.


Lèchefrite_a


2012 - Cet ustensile étant en service depuis plusieurs années, on devrait pouvoir avoir quelques retours : avantages, inconvénients, utilité réelle, règlementation, contenance, esthétique, fabrications, bidouilles,
les beaux,
les pas-beaux,
les qui-ont-évité-une-grosse-gamelle,
les qui-ne-servent-à-rien,
les qui-mal-fixés-ont-entraîné-une-grosse-gamelle...
 


Au début, la lèchefrite, ça part d'un très bon sentiment : éviter qu'il y ait de l'huile sur la piste.
Ça ressemble comme deux gouttes d'huile au très bon sentiment du départ de l'éthylotest : éviter qu'il y ait de l'alcool sur la route.

Mais, au moment de mettre les sentiments en forme, les deux partent en quenouille (non, ce n'est pas une coquille), et ça donne des règlements dont les inintelligences se ressemblent comme deux gouttes d'alcool.

Que ce soit le sabot qui n'est là que pour faire acte de présence en n'ayant que peu de chances de recueillir un jour un peu d'huile, ou le pipeau qu'il faut laisser inutilisé sans jamais lui souffler d'alcool, ça se ressemble comme les gouttes d'eau qui se mettent dans le sabot les jours de pluie et celles qu'on devrait mettre dans son vin... ce que je ne saurais faire.

Et d'abord, j'aimerais bien savoir quels sont les incidents qui sont à l'origine de l'obligation d'un récupérateur SOUS le moteur, d'une capacité au moins égale à LA MOITIE de la quantité d'huile contenue dans la moto.

Il ne doit pas s'agir de fuites sur des motos en mouvement : sur une moto en mouvement, l'huile ne tombe pas nécessairement à l'aplomb sous le moteur.

Il ne doit pas s'agir d'un moteur en fonctionnement : avec les pompes à huile, la totalité de la quantité d'huile est propulsée en une fraction de seconde.
Quel incident ne durerait que la moitié d'une fraction de seconde ?

Alors, qu'est-ce qui a pu un jour faire penser à quelqu'un qu'il fallait mettre ce truc ?


J'ai demandé aux membres du forum le plus approprié, celui des « motos anciennes en piste », de me bien vouloir me faire part de leurs expériences et avis sur ce sujet.
Il y a eu des réponses, généralement drôles, mais, durant les 3 semaines d'activité de la discussion (70 messages, plus de 1.500 lectures), aucune réponse justifiant la présence de l'ustensile.
Personne n'a écrit le moindre mot en faveur de cet accessoire.
 



Du forum :

« Pour moi c'est du bidon. »
 



« Moi j'ai toujours pensé que c'était pour garder les bécanes dans leur jus. »

 


Moi, j'imagine un petit décideur obscur, genre docteur Knock, et qui doit se plaîre à rappeler que c'est lui qui est à l'origine de cette décision qui améliore la Sécurité des Motards et l'Environnement de l'Humanité (avec des majuscules ! ) :
« Songez à toutes ces gouttes d'huile qui vont tomber dans les lèchefrites que toutes ces motos doivent à ma magnificence et à ma perspicacité...»

(Knock, c'était : « Songez que, dans quelques instants, il va sonner dix heures, que pour tous mes malades, dix heures, c’est la deuxième prise de température rectale, et que, dans quelques instants, deux cent cinquante thermomètres vont pénétrer à la fois ! ».)

Hé oui : la lèchefrite, aussi, ils l'ont bien faite pénétrer... dans la tête.
 



Du forum :

« Ça me rappelle que la seule fois où j'ai eu une grosse fuite il n'a servi à rien.
C'était aux essais sur une course Proclassic au Mans. J'ai commencé à partir en glissade au Musée et j'ai vu que ma botte gauche et mon pneu étaient pleins d'huile.
Arrêt d'urgence : de l'huile partout mais rien dans le récupérateur ; c'était le joint spi du sélecteur qui était parti de son logement. »

 


Ce qui aurait tendance à montrer que, pour un motard (on ne parle pas là des autres motards présents sur la piste), il serait préférable d'empêcher l'huile d'arriver sur le pneu arrière plutôt que de l'empêcher de sortir de la moto.

Pour ce problème-là, ce n'est pas un bac sous le moteur, mais une bavette devant le pneu arrière, qui serait plus efficace.


Il devra être d’une capacité...

Question : comment pourrait-on vérifier que le bidule fasse bien la contenance règlementaire ?

Quelqu'un a déjà vérifié ?

Sur celle-là : non.

Lèchefrite_b

Lèchefrite_c



[...] y compris l'huile de la boîte de vitesses si celle-ci est séparée [...]

Ci-dessous : une des deux MF de Tof le coyote.

Lèchefrite_d


Le bac est bien « sous le moteur ». (Il n'est pas « sous tout le moteur », loin s'en faut, mais ça, le règlement ne l'impose pas !)

Pourquoi la capacité de ce bac doit-elle être calculée en prenant en compte l'huile de la boîte (sur la photo, la boîte est derrière le talon de la botte du pilote), alors que la probabilité que cette huile de boîte se retrouve dans le bac est absolument nulle ? (le moteur et la boîte sont séparés par un embrayage sec).

Et pour rester logique avec lui-même, le règlement devrait donc imposer un bac de récupération de l'huile de boîte sous le moteur des 2T.
 



Du forum :

« Donc, pour faire simple, on accroche un bidon de 2 litres vide en dessous du berlingot et c'est bonnard...
Quand il pleut, on enlève le bouchon...

Et pour les carters secs, faut le mettre sous le réservoir d'huile ? »

 


Dans le domaine qui nous intéresse, c'est-à-dire quand il ne s'agit pas de chaussures, selon les dictionnaires courants (Larousse, Mediadico...), le mot « sabot » désigne une plaque, une garniture... mais il ne désigne pas un bac.
« Récupérateur d'huile » : ne donne aucune précision sur la manière de récupérer (il pourrait éventuellement s'agir d'ouvrir le bouchon de vidange dans le stand, et de récupérer l'huile dans le récupérateur ! ).

En définitive, en prenant le règlement à la lettre, il suffit qu'il y ait un bidon (même pas découpé pour en faire un bac - et pas nécessairement vide, d'ailleurs) attaché sous le moteur, et que ce bidon soit fermé par temps sec, et sans bouchon par temps de pluie.

Quant aux moteurs à carter sec, le règlement stipule capacité de la moitié du carter moteur : pour ce type de moto, le sabot récupérateur peut avoir une capacité nulle, mais il doit quand même être présent sous le moteur !


Les gens qui ont le pouvoir d'imposer des règles ont aussi, à mon avis, le devoir de faire attention à la précision de notre langue.


En cas de pluie
 



Du forum :

« Il pleut.
Il y a une fuite d'huile.
Le bidon n'a pas de bouchon.
L'eau étant plus lourde que l'huile, elle va s'évacuer en priorité.
Il ne faut surtout pas ralentir et il ne faut pas que la pluie faiblisse, sinon il n'y aura plus assez d'eau dans le bidon pour éviter que l'huile arrive au fond. »
 



« Il faudrait être un peu inventif les gars, et là, en cas de pluie, et même de forte pluie, plus de problème... »

Lèchefrite_e
 


C'est une idée !

Une autre : équiper les circuits de l'arrosage automatique.
Pas pour les pelouses : pour la piste !
En effet, puisque les récupérateurs doivent être ouverts par temps de pluie, c'est que le mélange { eau + huile } ne doit pas être néfaste pour l'adhérence.
Donc, si on maintient la piste mouillée, tout le monde peut laisser couler son huile, et il n'y a plus besoin de lèchefrite.
 


Il me semble que, au problème posé par l'obligation de mettre un truc sous le moteur, les pistards apportent la solution en mettant un truc sous le moteur, sans se poser la question de son utilité autre que celle de ne pas être refoulés au contrôle de piste.
En tous cas, pour ma part, c'est ce que j'ai fait.
Les seules questions que je me suis posées consistaient à rendre le bac aussi peu visible que possible.
Pour des raisons purement esthétiques, la lèchefrite a été placée entre le moteur et l'échappement, ce qui a nécessité de la concevoir en plusieurs parties :

0003 0006 4114 4129

Mais le temps ayant un peu passé, je me demande maintenant s'il ne pourrait pas y avoir mieux comme réponse.



J'essaye de recenser ces fameuses « casses mécaniques » à cause desquelles les règlements demandent la mise en place d'une lèchefrite.

Je cherche, et je trouve surtout des choses du genre : « casse moteur suite au manque d'huile dû à une fuite ».

Ce n'est pas la casse qu'il faut traquer; c'est la fuite.
Mais, est-ce la bonne méthode de « récupérer » la fuite ?
Est-ce que ça n'a pas plutôt pour effet de la rendre moins évidente, donc d'inciter à ne pas la réparer ?
 


L'autre moitié

Qu'en est-il de l'autre moitié de l'huile, celle que le sabot récupérateur n'est pas chargé de récupérer ?

Réponse : en cas de casse moteur, c'est par l'échappement que cette seconde moitié est évacuée.

Dans mes recherches de sabots récupérateurs, j'ai vu des systèmes efficaces pour la récupération à l'échappement, mais qui, justement pour les sabots, le sont moins quand la machine s'y pisse dessus.

crottin-barcelone2 crottin-barcelone1 crottin-barcelone3 crottin-barcelone4



Généralement, la « seconde moitié » part par l'échappement sous forme de panache de gouttelettes (le nuage bleu).
Pour éviter que ce panache ne se dépose sur la piste, il faudra le capter en l'air avec des brindilles de bruyère, des plumes d'autruche... qui pourront être fixées à la moto ou directement au pilote.

Lèchefrite_h


 


Conclusion

Il en est qui, bien que proches du problème, sont loin de l'avoir compris :
on trouve parfois des explications bien curieuses (et pour le coup, fumeuses) :

Lèchefrite_g

Un superbe contre-sens (et trois grosses fautes d'orthographe) dans un titre d'article, c'est môche, pour un professionnel (journaliste RTS) de la communication !

C'est par ce genre de rédacteur que doivent être pondus les articles des règlements de pistes !

 




blanc

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